Le Temps, samedi 22 juin 2002
« Il est important que le musicien sorte de sa tour d'ivoire »
Le pianiste Gilles Landini sillonne les cantons pour donner des concerts.
Rencontre avec un marathonien de laa Fête de la Musique.
Longtemps, sa mère l'a bercé sur ses genoux. Elle lui chantait des mélodies. Puis ce fut le choc Mozart. Un disque intitulé La vie de Mozart racontée aux enfants. Depuis 1995, Gilles Landini participe à toutes les Fêtes de la Musique. Il n'en loupe pas une. Cette année, ii va jusqu'à papilloner dans trois villes différentes - Genève, Neuchâtel. La Chaux-de-Fonds. Un pianiste à l'appétit d'ogre.
Gilles Landini, le public le connaît surtout par la télévision. Il a longtemps animé une chronique de vulgarisation musicale dans l'émission Zig-Zag Café. Pour gagner sa vie, il est professeur au Conservatoire de Neuchâtel et donne entre autres des cours d'initiation à la musique. Sa vocation? Rendre les compositeurs vivants. « Pour moi, la musique classique est actuelle parce qu'elle dit ce qui est propre à l'être humain. Les compositeurs sont des témoins de vie. » Et d'invoquer Mozart, lui qui donnait des concerts dans les parcs de Vienne. « S'il y a un ancêtre des Fêtes de la Musique, c'est bien lui ! » Ou encore beethoven, qui disait en subsance: « Celui qui comprend ma musique, celui-ci ne souffrira plus! »
Cette Fête de la Musique est donc l'occasion - sur le plan symbolique - de propager un amour incommensurable. Mais à qui profite-t-elle? « Que tous les musiciens s'arrêtent de jouer. Et on verra ce qui se passe. Et si on faisait la grève! » C'est surtout l'occasion de briser les tabous. De tendre une perche aux timides. « Certains adultes n'osent même pas entrer dans une salle de concert classique de peur de faire tache. Cette musique leur inspire une sorte de terreur. »
Voilà pourquoi, avant de jouer, Gilles Landini parle toujours. « Il est importantque le musicien sorte de sa tour d'ivoire. Le public aime cette relation si on peut présenter l'oeuvre d'une manière non pédante.» Tout un idéal, donc. Mais encore faut-il savoir s'organiser. L'an dernier, Gilles Landini lançait une « Scène hongroise » à la Fête de la Musique de Genève. Il s'improvise metteur en scène et monte l'opéra Le Château de Barbe-Bleue de Bartòk. Un an pour poser les jalons. Deux mois de préparation. Des conditions impossibles. « Comme nous n'étions pas une troupe constituée, j'ai eu l'impression d'être un SDF qui cherchait des locaux de répétition. Par bonheur, la commune de Meyrin nous a acceuillis. Des particuliers nous ont reçus chez eux. » Fin août, le même opéra est donné au Forum de Meyrin. Gilles landini souhaite aujourd'hui reprendre ce spectacle. Il est en discussion avec le Théâtre du Passage à Neuchâtel.
Si la Fête de la Musique est une vitrine pour ce musicien, les échos - et les gains - émanent du public. « Encore récemment, quelqu'un m'a parlé de l'opéra de Bartòk. Je me souviens qu'à la fin d'un récital, un gosse m'a salué. Il avait l'air de beaucoup vibrer pour la musique classique. Je lui ai demandé s'il jouait d'un instrument. Il m'a dit qu'il faisait du violon.» Son prénom? « Amédée, comme Mozart. » Mais le plus surprenant, c'est lorsqu'un jour, Gilles Landini s'est égaré en voiture dans une ferme du Val-de-Travers. Le voyant faire demi-tour, le fermier l'interpelle et lui dit: « Vous connaissez les tracteurs Landini? »
Julian Sykes
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